Une année à l’IHEST c’est l’apprentissage même d’une démarche de progrès. Démarche qui part de la confrontation des visions individuelles pour créer un espace commun dans lequel chacun d’entre nous abandonne une part de soi et accepte en rentrant dans le débat, de partager de nouvelles valeurs. Il s’agit, comme pour le débat public, d’un renoncement pour une émergence nouvelle, une renaissance. A cet égard le choix de Léonard de Vinci comme personnalité tutélaire pour la promotion 2012-2013 est tout à fait opportun. Mais renaitre est un exercice difficile.
Dans notre livre La Science et le Débat public, il est rappelé que la démocratie athénienne excluait de la Cité ceux qui parlaient trop ou avaient des discours de sachant, d’expertise dirait-on aujourd’hui. Un équilibre de la parole était recherché, un langage commun était exigé. L’exercice démocratique a évolué depuis, mais, au vu de l’indifférence, voire de la méfiance de beaucoup de nos concitoyens à l’égard des sciences, on peut s’interroger sur notre capacité collective à faire entrer la science dans le débat public et on est conduit à revisiter nos pratiques.
Une promotion d’auditeurs de l’IHEST reflète la diversité des arènes sociales, avec cependant une particularité : tous ceux qui y participent s’intéressent aux sciences et aux technologies et acceptent de redécouvrir avec l’IHEST la démarche scientifique comme démarche privilégiée pour décrire le réel et se rapprocher toujours plus de la vérité.
Experts dans des domaines très divers scientifique, économique, politique, syndical, journalistique… chacun devient un “non sachant” quand il sort de son domaine de compétences. D’une façon générale, ce basculement de posture est souvent mal assumé. Il n’est que d’entendre dans les médias les propos de certains scientifiques quand ils s’expriment en soi disant experts, sur des sujets qui ne sont pas les leurs. Or, de plus en plus, comme dans le débat public, les responsables professionnels sont conduits, du fait de la complexité des situations, à innover dans l’exercice de la décision. Ils deviennent des êtres hybrides, experts et non experts, développant une transversalité qui les oblige à comprendre ce qui se joue dans les autres domaines, à jongler avec les différences, à détecter des signaux faibles, dans le respect des compétences de l’autre.
Chaque promotion de l’IHEST, riche de sa propre diversité, s’exerce à cette écoute et à l’élaboration de questionnements pertinents. Expérience intellectuelle, le cycle national de formation représente aussi une formidable aventure humaine évoquée par les délégués de la promotion Léonard de Vinci lors de la clôture.
Le choix par la promotion de Léonard de Vinci est très significatif de l’héritage de l’ouverture au monde et du Progrès porté par la Renaissance qu’il nous faut revisiter aujourd’hui. Permettez-moi donc de partager avec vous quelques-unes des lignes de force qui me sont apparues cette année dans nos discussions, sans bien sur prétendre épuiser toutes les questions soulevées par ce sujet.